Annexe D (informative)  Règles simplifiées de vérification des éléments d'ossature supports de noues de toitures légères pour tenir compte du phénomène d'accumulation d'eau

D.1  Préambule

Le phénomène d'accumulation d'eau peut se produire en cas de précipitations importantes sur les toitures légères à faible pente en raison des déformations progressives des éléments-supports (fermes, pannes, bacs nervurés). Il consiste en un accroissement auto-évolutif des déformations des éléments flexibles supports de noue (panne ou poutre par exemple), en fonction également du débit des évacuations d'eaux pluviales créant une lame d'eau de mise en charge en « flaque » d'eau.

L'importance de celle-ci dépend de la déformation des supports et des pentes de versants et de noue.

L'eau contenue dans cette flaque induit une déformation du support de noue. La flaque s'étend alors en créant une déformation supplémentaire et ainsi de suite.

Ce phénomène d'accumulation d'eau donne donc lieu à un processus itératif dans lequel chaque accroissement de la déformation entraîne une aggravation de la charge, elle-même génératrice d'une amplification de la déformation..., ce qui peut conduire à l'effondrement s'il n'y a pas de convergence possible vers un équilibre final, du fait de la flexibilité des éléments de l'ossature.

Ce phénomène nécessite de vérifier impérativement leur stabilité sous l'effet des surcharges d'eau, outre leur vérification en contraintes et déformations (critère de limite de flèche de 1/200 de la portée en état limite de service) sous l'action des charges permanentes et des sollicitations climatiques normales, en application des règles Neige et Vent en vigueur.

L'importance du phénomène d'accumulation d'eau est accru pour les éléments supports de noue sans pente ou à faible pente (< 3 %) et il est conditionné également par :

  • les déformations cumulatives des différents éléments d'ossature ;

  • le nombre et le positionnement des entrées des évacuations d'eaux pluviales en noue, qui peuvent se situer en « travée » susceptible de déformation de l'élément d'ossature support direct de la noue ou sur appui indéformable en cas d'implantation au droit des appuis ;

  • les tolérances dans les niveaux d'implantation de l'ossature.

La vérification de la stabilité des éléments d'ossature sous l'effet des charges d'eau créant un phénomène d'amplification de l'accumulation d'eau en fonction des déformations, nécessite des calculs itératifs, d'une grande complexité en pratique. Il faut en effet établir que le risque d'accumulation d'eau ne conduit pas à des sollicitations inadmissibles (contraintes, déformations) pour les éléments d'ossature supports de noue dont la stabilité doit être assurée dans des conditions normales de sécurité en présence de ce phénomène d'amplification des déformations dues aux charges d'eau.

Il est donc apparu nécessaire d'établir des règles forfaitaires permettant, dans un domaine déterminé, de garantir la convergence du phénomène, sans avoir à effectuer le calcul itératif complet.

Les règles forfaitaires précisées ci-après ont été établies à titre de règles enveloppes générales, valables pour tout type d'élément-support de noue (béton armé, béton précontraint, charpente métallique, charpente en bois). Le respect de ces règles autorise une vérification simplifiée vis-à-vis du risque d'accumulation d'eau, dans le cas où la pente des versants de toiture est ≥ 3 % au droit des entrées d'eaux pluviales. Le choix de la pente de la noue et de la réalisation du système d'évacuation des eaux pluviales (avec entrées positionnées en travée ou sur appuis des éléments d'ossature fléchissants supports de noue) peut aussi permettre d'éviter le risque du phénomène d'accumulation d'eau.

L'application de ces règles simplifiées n'a pas de caractère obligatoire, à la différence de la justification impérative de la stabilité des éléments d'ossature sous le phénomène d'accumulation d'eau qui peut toujours être faite par le calcul théorique itératif spécifique, toujours assez difficile à maîtriser du fait des déformations cumulatives des différents éléments porteurs et supportés.

Néanmoins, ces règles simplifiées sont d'une utilisation pratique, même si dans certains cas elles pourraient apparaître pénalisantes, ce qui va cependant dans le sens de la sécurité avec le but d'éviter des effondrements d'ossature comme il s'en est produit lors d'orages, avec toutes leurs conséquences, qui peuvent être particulièrement graves, notamment vis-à-vis de la sécurité des personnes.

D.2  Etablissement des règles simplifiées

Ces règles consistent en une limitation de la déformation de l'élément-support sous l'effet d'une surcharge forfaitaire de valeur Q uniformément répartie sur l'ensemble de la surface supportée par l'élément d'ossature sollicité par des charges permanentes totales de valeur uniformément répartie équivalente G.

Cette surcharge Q représentative de la charge d'eau a été fixée égale à la charge climatique de neige normale Sn augmentée de la majoration de 20 daN/m² prescrite en noue par les règles N84 en leur article 4.

Il a été tenu compte de dispositifs d'évacuation d'eau conduisant à une épaisseur de lame d'eau n'excédant pas 55 mm par rapport au fil d'eau de la noue au droit des entrées d'eaux pluviales supposées positionnées sur appuis, ce qui correspond également au cas minimal de neige normale de 35 daN/m², soit avec la majoration 35 + 20 = 55 daN/m².

Ces règles simplifiées ont été déterminées et vérifiées avec un programme informatique adapté dans les hypothèses les plus courantes suivantes :

  • portées des éléments d'ossature supports de noue variant de 5 m à 20 m ;

  • entraxes des éléments supports des bacs nervurés variant de 3 m à 6 m ;

  • valeurs des charges permanentes variant de 30 daN/m² à 150 daN/m².

Le critère de limite de la déformation a été déterminé de telle façon que, lorsqu'il est respecté, le moment de flexion M (G + eau) dans le support de noue sous les charges (G + eau) à la fin du phénomène de convergence, soit inférieur au moment M (G + Sn + 20) dû à l'état de chargement G + Sn + 20 (daN/m²) pour lequel l'élément support de noue a été obligatoirement dimensionné conformément à la réglementation en vigueur, avec une limitation de la déformation à 1/200 de la portée. Dans ces conditions, avec un moment de convergence M (G + eau) inférieur à M (G + Sn + 20), le phénomène d'accumulation d'eau converge nécessairement vers un état de contraintes et déformations admissibles.

D.3  Enoncé des règles simplifiées

Les critères de limitation de la flexibilité des éléments d'ossature supports de noue sont définis aux paragraphes suivants, en fonction de la pente de la noue avec la borne 0,8 % + (4/L) %.

L : portée de l'élément d'ossature support de noue, en mètres, (le terme « travée » est employé dans l'annexe F pour éviter la confusion avec la portée des tôles d'acier nervurées).

NOTE

La borne sus indiquée est issue d'une étude ayant permis de déterminer la frontière du domaine des configurations telles que la limitation de flèche au 1/200 de la portée (inégalité du paragraphe D.3.1) est suffisante pour couvrir le risque d'accumulation d'eau, compte tenu des tolérances de pose des ouvrages concernés.

D.3.1  Pente de noue théorique ≥ 0,8 % + (4/L) %

Dimensionnement des éléments d'ossature supports de noue en fonction des règles en vigueur spécifiques aux différents types d'ossature (règles BAEL, règles BPEL, règles CM, règles CB), avec la condition de limitation de flèche, complémentaire ou prescrite dans certaines de ces règles, suivante : avec sous charge permanente et f(SN +20)i sous charge de neige

D.3.2  Pente de noue théorique < à 0,8 % + (4/L) %

Dimensionnement des éléments d'ossature supports de noue en fonction des règles en vigueur spécifiques aux différents types d'ossature avec la condition complémentaire suivante : avec :

  • E (en mètres) : largeur prise perpendiculairement à la noue, de la surface de toiture supportée directement par l'élément d'ossature porteur de noue supposé uniformément chargé (c'est-à-dire, par exemple pour une noue centrale, l'entraxe des pannes si leur espacement est le même de part et d'autre de la panne de noue) ;

  • f (en centimètres) ;

    NOTE 1

    Cette limitation de la déformation, où n'apparaît pas la portée qui est déjà intégrée dans le calcul, dépend globalement de l'importance relative des charges d'eau initiales (SN + 20) par rapport aux charges permanentes G.

Significations :

  • G état de chargement correspondant aux charges permanentes et assimilables, telles que charges intérieures suspendues sous l'élément d'ossature considéré ;

  • SN + 20 état de chargement correspondant aux charges de neige normale conformément aux règles N84 (édition août 1987), en tenant compte d'une majoration de 20 daN/m² en noue prescrite en leur article 5 ;

  • P état de chargement correspondant au seul effet de la précontrainte, celle-ci étant la précontrainte moyenne pour les ouvrages en béton précontraint ;

  • f déformations absolues dues aux états de chargement en charges uniformément réparties G, SN+ 20 (en daN/m²) sur l'ensemble de la surface supportée par l'élément d'ossature support de noue ;

  • fo contreflèche de construction prévue sur plan (coffrage, montage, profil d'extrados...) ;

  • fG∞ déformation absolue correspondant aux charges permanentes seules, calculée en considérant le module de déformation longitudinale différée et sans tenir compte de la contreflèche éventuelle de construction (fo) ou par précontrainte (fp∞) ;

  • fp∞ déformation absolue due à la précontrainte seule et calculée en considérant le module de déformation longitudinale différée ;

  • f (SN + 20)i déformation absolue correspondant à la surcharge SN + 20, en considérant le module de déformation longitudinale instantanée.

NOTE 2

Les critères de limitation de la flexibilité ne dispensent en aucune façon de la vérification propre à chaque type d'ossature, conformément à sa réglementation spécifique, en dehors du phénomène d'accumulation d'eau lorsqu'il n'y est pas pris en compte.