5  Etats limites ultimes (ELU)

5.1  Matériaux

5.1.1  Armatures

Conformément aux articles 3.2 et 3.3 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA), il est possible d'adopter pour les armatures soit un diagramme de calcul avec branche horizontale soit avec branche inclinée (repère [B] des diagrammes contraintes-déformations des figures 11, 12 et 16).

Dans le cas où l'on adopte un diagramme de calcul avec branche horizontale, il n'y a pas de limite de déformation pour l'acier. La courbure d'équilibre sera déterminée par l'atteinte du raccourcissement maximum pour le béton.

Si à l'inverse on adopte un diagramme avec branche inclinée, l'allongement limite εud est déduit de l'allongement à rupture εuk par la relation εud = 0,9 εuk.

NOTE 1

En l'absence d'information plus précise, on pourra retenir εuk = 0,9 Agt où Agt est le pourcentage minimum d'allongement à la force maximale défini dans la norme NF EN 10138-1.

Par ailleurs, la limite d'élasticité conventionnelle pour les armatures de précontrainte est déduite de la résistance en traction en considérant fp0,1k/fpk = 0,9.

En alternative à l'utilisation des diagrammes contraintes-déformations définis aux chapitres 3.2 et 3.3 de la norme NF EN 1992-1-1, lorsqu'il est fait usage pour les armatures de précontrainte des diagrammes contraintes-déformations réels, ces diagrammes doivent être documentés et la procédure correspondante doit être surveillée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos.

Pour les armatures de béton armé, le rapport ft/fy est donné à l'annexe C de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA), en fonction de la classe de l'acier considéré.

La déformation relative initiale des armatures de précontrainte est déterminée en considérant la précontrainte probable : Pd,t(x) = γp Pm,t(x), avec γp = 1,0 comme mentionné aux paragraphes 2.4.2.2 et 5.10.8 (1) de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Pour les éléments préfabriqués, la valeur du coefficient partiel de sécurité sur l'acier γs est pris égal à 1.15. Si les éléments bénéficient d'une certification de produit délivrée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos et portant sur l'ensemble des exigences définies dans la norme NF EN 13225, le coefficient partiel de sécurité sur l'acier γs est pris égal à 1.10. Cette valeur de γs égale à 1,10 peut être conservée lorsque les éléments préfabriqués sont associés à une partie coulée en oeuvre et si les tolérances sur la dimension transversale vérifient les exigences du Tableau A.1 de l'annexe A de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

NOTE 2

La certification « Marque NF » ou son équivalent dans les conditions indiquées dans l'avant-propos, vaut la preuve du respect des exigences définies dans la norme NF EN 13225.

Pour les armatures mises en oeuvre sur chantier, la valeur de γs est déterminée suivant l'annexe A de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Lorsque l'armature n'est que partiellement ancrée, le diagramme de calcul est modifié pour limiter la contrainte en fonction de la force effectivement disponible dans la section considérée (repère [C] des diagrammes contraintes-déformations des figures 11, 12 et 16.

NOTE 3

Les contraintes admissibles dans les zones d'ancrage des armatures (σy,max pour les armatures de béton armé, σp1,max et σp2,max pour les armatures de précontrainte) sont déterminées à l'abscisse considérée. L'équilibre de la section est ensuite vérifié, comme indiqué au paragraphe 5.2, en retenant, pour un allongement donné, la valeur de contrainte la plus faible entre celle issue de la loi [B] retenue ou de la loi [C].

5.1.1.1  Diagramme de calcul relatif aux armatures de béton armé

La contrainte maximale dans les armatures σy,max correspondant à la force ancrée est égale à la contrainte de calcul σsd déterminée suivant le paragraphe 8.4 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA), en fonction de la longueur lbd à l'abscisse considérée (figure 11).

Figure 11  Diagramme de calcul des armatures passives

5.1.1.2  Diagramme de calcul relatif aux armatures de précontrainte actives

La contrainte maximale est déterminée, pour chaque armature, en fonction de la distance de l'abscisse considérée à :

  • l'extrémité de la gaine lorsque l'armature est gainée ;

  • l'about de l'élément, en tenant compte de l'ancrage complémentaire éventuel dans la partie en dépassement, dans le cas d'armature non gainée.

Le diagramme de calcul est représenté sur la figure 12. La valeur σp1,max est déterminée en tenant compte :

La valeur σp2,max est déterminée avec une contrainte d'adhérence égale à fbpd sur toute la longueur d'ancrage.

NOTE 1

Les variables utilisées ont les définitions données au paragraphe 8.10.2.3 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Figure 12  Diagramme de calcul des armatures de précontrainte

Figure 13  Contrainte de calcul dans une armature de précontrainte sans dépassement à l'about ou pour une armature gainée

NOTE 2

Le coefficient α2 est égal à 0,19 pour les torons et à 0,25 pour les armatures de section circulaire.

L'effort supplémentaire équilibré sur la partie dépassante est évalué conformément au paragraphe 5.5.1.

Figure 14  Contrainte de calcul dans une armature de précontrainte avec dépassement à l'about

où σ p est la contrainte de calcul dans les armatures de précontrainte calculée au droit de la section d'about de la poutre et limitée à :
  • 300 ηp2 dans le cas d'armatures droites

  • dans le cas d'armatures coudées sans dépasser 450 ηp2

  • avec ηp2 = 1,2 pour les torons et 1,4 pour les fils à empreintes.

Figure 15  Ancrage des armatures de précontrainte dépassantes coudées

NOTE 3

Le coefficient α2 est égal à 0,19 pour les torons et à 0,25 pour les armatures de section circulaire.

5.1.1.3  Diagramme de calcul relatif aux armatures de précontrainte utilisées comme armatures passives

Le diagramme de calcul est représenté en figure 16.

Figure 16  Diagramme de calcul des armatures de précontrainte utilisées comme armatures passives

La valeur de la contrainte σp2,max est déterminée comme indiqué en 5.1.1.2 pour les armatures actives.

5.1.2  Béton

La vérification peut être réalisée en considérant le diagramme parabole-rectangle, le diagramme bilinéaire ou le diagramme rectangulaire tels que définis en 3.1.7 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Pour le béton des éléments préfabriqués, la valeur du coefficient partiel de sécurité γc est pris égal à 1.50. Si les éléments bénéficient d'une certification de produit délivrée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos et portant sur l'ensemble des exigences définies dans la norme NF EN 13225, le coefficient partiel de sécurité sur le béton γc est pris égal à 1.35.

NOTE

La certification « Marque NF » ou son équivalent dans les conditions indiquées dans l'avant-propos, vaut la preuve du respect des exigences définies dans la norme NF EN 13225.

Pour le béton de chantier, la valeur du coefficient partiel de sécurité γc est déterminée suivant l'annexe A de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

5.2  Vérification à la flexion

Dans toute section Σ d'abscisse x, la valeur du moment résistant est déterminée conformément à l'article 6.1 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA). Les contraintes dans les armatures sont limitées en fonction de l'ancrage de ces dernières.

La force maximale pour chaque armature est celle ancrée à l'abscisse x, lorsque la contrainte maximale de traction est inférieure ou égale à fctk0,05. La vérification est réalisée sous la combinaison d'action considérée à l'état limite ultime, en section homogène non fissurée, en tenant compte du phasage.

Si la contrainte maximale de traction excède fctk0,05, la force maximale est déterminée à une abscisse décalée de δi avec :

  • δi = z + (d — di) dans le cas d'un élément sans armatures transversales (figure 17) ;

  • δi = z (cot θ — cot α)/2 + (d — di) cot θ dans le cas d'un élément armé transversalement (figure 18).

Dans ces expressions :

  • di est la distance de l'axe de l'armature considérée à la fibre comprimée de la section ;

  • d est la distance de la résultante des forces de traction dans les armatures à la fibre comprimée de la section ;

  • θ et α sont définis à l'article 6.2.3 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Vis-à-vis des vérifications sous moments positifs, la valeur du décalage δ i ne peut excéder (x — a i), a i ayant la définition donnée au paragraphe 3.2.2.2.

Figure 17  Règle du décalage sous moment positif pour un élément non armé transversalement

Figure 18  Règle du décalage sous moment positif pour un élément armé transversalement

Lorsque le débord participant de l'aile est supérieur à 20 fois son épaisseur (beffi / hf > 20), la déformation moyenne en compression du béton doit vérifier l'article 6.1 (5) de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Figure 19  Membrure comprimée des éléments fléchis

5.3  Vérification à l'effort tranchant

5.3.1  Généralités

La résistance à l'effort tranchant est déterminée à l'état limite ultime conformément à l'article 6.2 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

Lorsque des charges sont appliquées sur la face supérieure de l'élément, à une distance av du nu de l'appui telle que 0,5d ≤ av < 2d (ou au centre de l'appareil d'appui s'il est souple), la contribution de cette charge à l'effort tranchant agissant VEd peut être multipliée par β = av / 2d (où d est la hauteur utile de l'élément). Pour av ≤ 0,5d, il convient de prendre la valeur av = 0,5d.

Figure 20  Principe de réduction de l'effort tranchant agissant

Il convient de maintenir les armatures d'effort tranchant requises jusqu'au droit de l'appui.

NOTE 1

La réduction de l'effort tranchant agissant revient, dans le cas d'éléments soumis principalement à des charges uniformément réparties, à ne pas effectuer de vérification à l'effort tranchant à une distance au nu de l'appui inférieure à d.

Pour les sections composites, la vérification de la compression dans les bielles est faite pour trois zones, comme indiqué sur la figure ci-après :

  • au niveau de l'âme de la poutre de largeur bw (niveau 1), avec une résistance à la compression du béton égale à fck1 ;

  • au niveau de la surface de reprise avec le plancher (niveau 2), avec une résistance à la compression du béton égale à 1,25 fck3 ;

  • à mi-épaisseur du plancher (niveau 3), avec une résistance à la compression du béton égale à fck3 et en considérant une diffusion à 45° à partir des extrémités du plancher.

NOTE 2

La majoration de la résistance du béton au niveau de la surface de reprise avec le plancher suppose un confinement efficace.

Figure 21  Principe de vérification des bielles comprimées pour les sections composites

La vérification le long de la poutre est faite en considérant les bielles d'inclinaisons variables, par tranche de longueur égale à z × cotθ.

NOTE 3

La variation de l'angle θ entre deux tranches successives ne peut excéder 12°.

Dans les régions où il n'y a pas de discontinuité de l'effort tranchant, la section d'armatures transversales nécessaire sur la longueur de la bielle est déterminée en prenant la plus petite valeur de l'effort tranchant VEd sur cette longueur.

5.3.2  Cisaillement le long des surfaces de reprise

Le cisaillement des surfaces de reprise est déterminé à l'état limite ultime conformément à l'article 6.2.5 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA). Si les éléments bénéficient d'une certification de produit délivrée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos et portant sur l'ensemble des exigences définies dans la norme NF EN 13225 ainsi que sur la rugosité de surface des éléments, des coefficients c et μ différents pourront être définis par analogie aux états de surface décrits à l'article 6.2.5, en fonction de la rugosité obtenue par le procédé de fabrication.

NOTE 1

La certification « Marque NF » ou son équivalent dans les conditions indiquées dans l'avant-propos, vaut la preuve du respect de ces exigences.

NOTE 2

Les armatures de coutures peuvent être différentes des armatures utilisées pour l'effort tranchant.

5.4  Vérification à la torsion

Les contraintes de cisaillement de torsion sont à prendre en compte et à cumuler aux cisaillements d'effort tranchant chaque fois que les effets de torsion ne peuvent pas être négligés.

La résistance à la torsion est déterminée à l'état limite ultime conformément à l'article 6.3 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA), en considérant la section comme une section fermée à parois minces où l'équilibre est assuré par un flux de cisaillement.

La section réelle peut être remplacée par une section creuse équivalente dont l'épaisseur de la paroi peut être prise égale au sixième du diamètre du cercle qu'il est possible d'inscrire dans le contour extérieur (figure 22).

Pour les poutres de section en « Té », le débord participant de l'aile de la table à considérer pour le calcul de l'aire intérieure au feuillet moyen des parois est au plus égale à trois fois l'épaisseur de la table.

Figure 22  Définition de l'épaisseur de la paroi effective

Les armatures transversales de torsion sont déterminées par :

où :

  • Ast est la section d'armatures transversales ;

  • st est l'espacement entre armatures transversales ;

  • fywd est la limite d'élasticité de calcul des armatures transversales ;

  • θ est l'angle d'inclinaison des bielles de compression, prise égal à celui utilisé pour la vérification de l'effort tranchant ;

  • TEd est le moment de torsion agissant de calcul ;

  • Ak est l'aire intérieure au feuillet moyen des parois, partie creuse comprise.

5.5  Vérification de l'ancrage à l'état limite ultime

5.5.1  Ancrage des armatures sur appuis

L'effort de traction à ancrer sur appui est déterminé à l'abscisse ai telle que définie au paragraphe 3.2.2.2 (figure 1).

L'effort supplémentaire équilibré sur la partie dépassante est évalué en considérant une contrainte d'adhérence égale à f*bpd et une longueur droite équivalente égale à (lb /α) où lb est la longueur d'ancrage de référence, mesurée le long de l'axe de l'armature (quelque soit la forme du tracé) et α = α1 α2 α3 α4 α5 tels que définis au paragraphe 8.4.4 (Tableau 8.2) de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

La contrainte d'adhérence f*bpd est définie à l'article 8.10.2.3 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA) et calculée avec la résistance du béton de clavetage.

5.5.2  Compression dans la bielle

La résistance de calcul de la bielle doit être vérifiée conformément au paragraphe 6.5.4 (4) de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA).

NOTE

Pour les poutres continues, la vérification des appuis de continuité est réalisée en considérant le cas du noeud soumis à compression sans tirant.

5.6  Stabilité de forme

Les effets du second ordre sont examinés conformément à l'article 5.8 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA)

Dans le cas d'application de la méthode générale, lorsque les éléments bénéficient d'une certification de produit délivrée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos et portant sur l'ensemble des exigences définies dans la norme NF EN 13225, la participation du béton tendu peut être prise en compte. La contrainte maximale de traction est fixée à fctm,fl.

NOTE

La certification « Marque NF » ou son équivalent dans les conditions indiquées dans l'avant-propos, vaut la preuve du respect des exigences définies dans la norme NF EN 13225.

5.7  Instabilité latérale des poutres

L'article 5.9 de la norme NF EN 1992-1-1 avec son annexe nationale française (NF EN 1992-1-1/NA) s'applique.

NOTE

Les pannes liaisonnées à la poutre porteuse par des assemblages susceptibles d'équilibrer des moments peuvent contribuer significativement à la résistance au déversement.

Il convient de tenir compte de la torsion associée à l'instabilité latérale pour le calcul des assemblages et des structures porteuses.

La justification de la stabilité latérale consiste à vérifier que :

  • en situations transitoires (levage, mise en oeuvre) :

  • en situations durables (service) :

    où :

    • MEd est le moment sollicitant à l'état limite ultime ;

    • Mcr représente le moment critique vis-à-vis du déversement, pris égal à :

    • NEd est l'effort normal sollicitant à l'état limite ultime (contreventement, composante normale liée au levage par élingues inclinées…) ;

    • NRd est l'effort normal résistant vis-à-vis du flambement transversal déterminé en prenant en compte une excentricité additionnelle égale à l0t /300. Si les éléments bénéficient d'une certification de produit délivrée par un organisme accrédité au sens de l'avant-propos et portant sur l'ensemble des exigences définies dans la norme NF EN 13225, l'excentricité additionnelle est prise égale à l0t /500.

      NOTE

      La certification « Marque NF » ou son équivalent dans les conditions indiquées dans l'avant-propos, vaut la preuve du respect des exigences définies dans la norme NF EN 13225.

    • l0t est la distance entre éléments s'opposant au déversement ;

    • Mcr,fl est le moment critique en flexion simple, déterminé en application de la théorie de la stabilité élastique des poutres. La rigidité de flexion latérale des poutres est prise égale à B = Ecm Iy où Iy représente l'inertie de la poutre vis-à-vis de la flexion latérale. La rigidité de torsion C = G J est déterminée en fonction de G, module d'élasticité transversale du matériau G = 0,4 Ecm et de J, moment d'inertie de torsion de la section.